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Confusion ( La saga des Cazalet Tome 3)- Elizabeth Jane Howard


Après les deux premiers tomes, les personnages de cette saga me sont familiers et j’ai été heureuse de les retrouver pour environ 500 pages. Dans ce tome, on retrouve toute la famille Cazalet et ses diverses ramifications pendant la période de la fin de la seconde guerre mondiale, de 1942 à 1945. Dans la lignée du précédent livre, Confusion se recentre sur la « jeune génération » et en particulier, sur les jeunes femmes qui entrent dans le monde adulte : premiers emplois, premières amours, mariages et maternité pour certaines. Le tout en rendant parfaitement l’atmosphère de cette période troublée, dans une famille partagée entre les traditions perpétuées par les anciens et les nouvelles idées qui émergent, telles que le socialisme, le féminisme. On ressent bien les évolutions de la société britannique et son fonctionnement.

L’écriture de l’autrice est toujours aussi agréable à lire, et j’ai hâte de voir les prochains tomes paraître !




Extrait P 90

Je m’apprêtais à écrire qu’elle semble se remettre de la mort de sa mère, mais cette expression me paraît vide de sens. Je ne crois pas que les gens se remettent jamais d’une chose aussi terrible ; elle cesse peut-être d’être leur unique ou principale obsession, et pourtant quand ils y pensent, ils souffrent toujours autant. En réalité, je ne sais pas ce que ressent Polly parce que je ne suis pas elle. C’est ce qui rend les gens si intéressants, tu ne crois pas ? La plupart du temps on n’a pas la moindre idée de ce qu’ils ressentent, parfois on en a une toute petite idée et, d’autres fois, j’imagine, on le sait pour de bon.




Extrait P 110

Louise avait beau ne pas être un simple personnage dans une pièce de théâtre, elle n’avait pas du tout l’impression d’être un œuf ; elle se serait plutôt comparée à une dalle dans un pavage irrégulier, ou à un morceau de puzzle. Elle ne savait plus qui elle était ; même les éléments disparates du pavage ou du puzzle ne semblaient pas lui appartenir, s’apparentant davantage à ces petits rôles sans importance auxquels elle avait fini par s’habituer, et qu’elle jouait par conséquent avec dextérité. Mrs Michael Hadleigh était un de ces rôles. La jeune épouse chanceuse d’un homme séduisant qui, au dire de Zee, avait brisé un nombre incalculable de cœurs.



Extrait P 122

Quand elle écrivait à Stella, elle parlait surtout de ses lectures. « Au fait, je suis enceinte ! » lâcha-t-elle à la fin d’une lettre. Le point d’exclamation était censé rendre l’annonce excitante. Elle songea à raconter à Stella les sentiments que lui inspirait sa grossesse, et à quoi ressemblait sa vie, mais ne put s’y résoudre. Elle aurait été obligée de réfléchir sérieusement à la situation, or elle se sentait trop désorientée et trop pétrie de doutes pour s’y hasarder. Et puis elle craignait de lever le voile sur des choses qu’elle serait incapable de regarder en face. Tant qu’elle jouait son rôle ( et elle était bel et bien amoureuse de Michael : il suffisait de voir comme elle détestait qu’il s’en aille le matin et comme elle comptait les heures jusqu’à son retour), ce serait une sorte de trahison de dire qu’elle trouvait sa vie difficile, ou ennuyeuse.




Extrait P 180

Je continue à écrire ce journal autant pour moi, que pour toi parce que ça m’aide à me souvenir de toi… je veux dire, à mieux se souvenir de toi. Une des difficultés dans le fait qu’il se soit écoulé tant de temps depuis ton départ – deux ans et neuf mois maintenant – c’est que, même si je pense beaucoup à toi, il semble que je me rappelle moins de choses sur toi. Je les récapitule en permanence, mais je n’arrête pas de me dire qu’il y en a d’autres dont je ne me souviens plus. C’est comme si tu t’éloignais lentement de moi à reculons. J’ai horreur de cette sensation. Si c’est ce que les gens veulent dire quand ils prétendent que le chagrin s’atténue, je n’en veux pas. Je veux me souvenir de toi aussi complètement et aussi vivement que le soir où l’homme a téléphoné pour annoncer que tu avais disparu ; autant que quand Pipette a apporté le mot incroyable que tu m’avais écrit et que je garde dans le tiroir secret du bureau que Poll m’a donné.




Extrait P 229

Un silence gêné s’établit. Autrefois, elle aurait pensé qu’il flirtait avec elle et aurait su exactement quoi faire, ou ne pas faire ; elle aurait décidé de l’étape suivante. Aujourd’hui, elle était désemparée : elle n’avait aucune idée de ce qui se passait, elle avait seulement la sensation déroutante qu’il comprenait mieux qu’elle de quoi il retournait.

« Il est très difficile d’être heureux dans une guerre.

- Pourquoi dites-vous cela ?

- Parce que je sens que vous vous reprochez de ne pas être heureuse. Pourquoi le seriez-vous ? Avec des gens qui se font tuer sans arrêt, massacrer, assassiner et parfois torturer auparavant, et puis les familles brisées, les couples séparés, la pénurie de toutes les choses qui facilitent la vie, une routine monotone et une absence générale de ce qui pourrait s’apparenter à de l’amusement, pourquoi devriez-vous… pourquoi quiconque devrait-il être heureux ? On peut subir – les Anglais semblent être devenus très doués pour ça -, mais pourquoi devrait-on y prendre plaisir ? Je sais que le tempérament britannique est réputé pour son flegme, mais on ne peut pas dire que ça facilite le sourire ! »





Extrait P 307

Si elle s’était entêtée pour ces vacances, c’était surtout pour montrer à Rachel qu’elle n’était pas disposée à voir sa vie perpétuellement bouleversée par ses parents et la conception qu’elle avait de son devoir envers eux. Dire qu’autrefois j’aurais été reconnaissante de l’invitation de la Duche… j’aurais rampé là-bas, ivre de gratitude pour grappiller quelques minutes en compagnie de Rachel lorsqu’elle arrivait à se libérer. Je n’aurais jamais songé à réaliser sans elle un projet échafaudé pour nous deux. J’aurais été effondrée, mais pas en colère. Et je n’aurais pas envisagé un seul instant d’emmener en vacances une fille de plus de vingt ans ma cadette. D’autant moins en la sachant amoureuse de moi.




Extrait P 369

Ils se réconcilièrent : le pardon était facile, mais le bonheur parfait et sans mélange qu’elle avait connu devint fugace, incertain : le présent contaminait le passé, et était infecté par l’avenir. Cette dispute lui fit comprendre non seulement combien elle l’aimait mais combien elle le connaissait peu.



Extrait p 455

Louise resta allongée à écouter le bruit lointain de la circulation dans Tottenham Court Road. Sa nervosité s’était dissipée. Les infirmières ici paraissaient gentilles et efficaces, quant à l’opération, elle s’en moquait. Il lui semblait même que si elle devait rester sur le billard elle s’en moquerait aussi. Depuis qu’elle avait appris la mort de Hugo, elle perdait un peu les pédales et elle était incapable de se ressaisir. Alors, si un médecin hors de prix la tuait par mégarde, elle serait soulagée des efforts incessants qu’elle devait déployer pour feindre d’avoir des centres d’intérêt, des opinions et des sentiments. Elle était douée pour faire semblant ; c’était, après tout, un simple exercice d’actrice, quelque chose qui devenait pour elle une seconde nature et qui ne portait pas à conséquence, mais une telle comédie exigeait un effort et elle était constamment fatiguée.



Extrait P 459

Pour la première fois elle regardait en face la possibilité effrayante de ne plus être mariée à Michael… Elle n’était pas l’épouse qu’il lui fallait : non, l’expression était faible, elle ne ferait une épouse convenable pour personne. Elle ne l’aimait pas : il était à la fois trop vieux et trop jeune pour elle, et elle trouvait sa relation avec sa mère à la fois méprisable et terrifiante. Peut-être n’était-elle pas capable d’amour…. Mais on touchait là à quelque chose de si douloureux qu’elle s’interdisait de l’approfondir. D’une manière ou d’une autre, à un moment ou un autre, elle semblait s’être trompée, avoir commis, en actes ou en paroles, des erreurs qu’il était désormais impossible d’effacer…

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