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Le cri - Nicolas Beuglet

  • Photo du rédacteur: deslivresetmoi72
    deslivresetmoi72
  • 10 oct. 2021
  • 5 min de lecture

Livre-surprise (emballé de Kraft par la librairie, avec juste quelques mots-clés sur l’emballage) offert par une de mes élèves en fin d’année scolaire. Ce n’est pas forcément le genre de livres vers lequel je vais spontanément, je ne connaissais aucun roman de cet auteur dont j’avais cependant entendu parler. Je l’ai abordé sans vraiment savoir à quoi m’attendre. J’ai d’abord été agréablement surprise, conquise par le début de l’histoire, mais ensuite, je me suis un peu lassée, j’ai « décroché » …lorsqu’est arrivée la surenchère d’actions et de péripétie set que les personnages présentés comme ordinaires s’en sortent avec des exploits dignes de super-héros invincibles. Je comprends qu’on puisse adhérer à ce genre de récits plein d’actions et de rebondissement, mais ce n’est pas mon cas. A réserver aux amateurs de thrillers et d’actions !


Tout commence à Oslo avec le meurtre déguisé en suicide d’un énigmatique patient sans nom d’une unité fermée d’un hôpital psychiatrique. Sarah Geringën, l’enquêtrice, découvre un univers secret. Sa perspicacité et son opiniâtreté vont l’entraîner dans le monde de l’espionnage et des recherches scientifiques secrètes menées après la guerre par les Etats-Unis et la Russie et leurs alliés respectifs. Le personnage de Sarah est attachant et j’aurais aimé que l’auteur lui donne plus de place sur le plan « personnel », mais le parti pris de ce roman est la résolution de cette enquête compliquée, internationale et dangereuse. J’ai trouvé ce roman plein d’originalité et bien construit.


Extrait P 22

Sarah supportait mal de reparler de son passage au sein des forces spéciales. Leur division était certes très bien entraînée, mais sous-équipée pour contrer rapidement des actes terroristes. La tuerie d’Anders Breivik en avait été selon elle la tragique illustration. Leurs trente minutes de retard pour arriver sur l’île d’Utoya à cause d’un problème de moteur étaient pour Sarah et nombre de ses collègues de l’époque la cause directe de la mort de trente adolescents sur les soixante-dix-sept victimes. A la suite de ce qu’elle qualifiait d’inavouable échec, elle avait ainsi quitté la division pour rejoindre la police nationale en qualité d’inspectrice. En espérant que l’analyse et la perspicacité permettraient au final de sauver plus de vies que les interventions de dernière minute mal calibrées.


Extrait P 49

- A quoi correspondent ces cicatrices en forme de chiffres sur son front ? C’est quand même bizarre, non ?

- J’étais sûr que vous alliez me poser cette question. Il les avait déjà en arrivant ici. Mais on n’a jamais su ce que cela signifiait. Et lui n’a jamais dit d’où ça lui venait.

Sarah aurait pu s’en tenir à cette réponse, rentrer chez elle, attendre le rapport du légiste et classer l’affaire comme mort accidentelle d’un amnésique sans famille. Après tout, elle n’était pas là pour connaître le vie de la victime et s’amuser à déchiffrer une vieille cicatrice. Elle devait juste déterminer s’il s’agissait d’un suicide, d’un homicide ou d’une mort naturelle.

Et pour cela elle allait devoir bousculer le directeur. Car si tout ce qu’il disait paraissait vrai, Sarah avait le sentiment qu’il était un peu trop installé dans sa zone de confort. Comme si, au fond, elle n’était qu’une employée un peu plus considérée que les autres.


Extrait P 62

Elle aperçut bientôt les toilettes, se précipita dans la première cabine, verrouilla la porte et s’assit sur la cuvette. Les lèvres pincées, elle s’efforça d’inspirer calmement par le nez alors que la peine frappait contre sa poitrine.

Les cris d’Erik lui étaient brutalement revenus en tête : « On s’est perdus, Sarah ! On s’est perdus à force de ne faire exister notre couple qu’à travers cet unique et putain projet d’enfants ! »

C’était ainsi qu’il se justifiait de l’avoir trompée et de la quitter.

Alors oui, elle avait peut-être trop voulu ce bébé au détriment de son couple. Oui, elle s’était battue avec son corps, avec son âme pour ne pas fléchir dans cette épreuve et, forcément elle avait moins donné à Erik. Mais jamais elle ne lui avait fermé ses bras ou son écoute. Jamais. Alors pourquoi ne lui avait-il pas fait part de ses craintes avant qu’il ne soit trop tard ?

Sarah sentait au fond d’elle qu’elle détenait la réponse et la douleur n’en était que plus aiguë : s’il n’avait rien dit, c’est qu’il n’en avait pas envie.


Extrait P 85

Le gradé confirma qu’il prenait la situation en main. Sarah s’éloigna pendant qu’une nouvelle série de véhicules de pompiers et de secours débarquaient en soulevant des volutes de neige, le tourbillon des gyrophares bleus se mêlant au déchaînement des flammes qui dévoraient l’hôpital.

Alors que le camion radio mobile d’une équipe de télévision se garait, Sarah sentit son portable vibrer dans sa poche. Elle consulta l’écran : Stefen Karlstrom, son supérieur hiérarchique.

Elle rejoignit sa voiture, claqua la portière d’un geste las et laissa l’appel passer en messagerie. Vidée, elle s’abandonna contre le dossier de son siège, un frisson glacé lui courant le long du dos, le cœur si lourd.

Ce soir, elle n’aurait aucun corps chaud auprès duquel se blottir pour apaiser les tourments de ce qu’elle venait de traverser. Aucune voix pour lui perler d’avenir et rêver à de nouveaux projets. Ce soir, elle serait seule avec pour unique échappatoire une affaire qui s’annonçait comme la plus violente et la plus bizarre de sa carrière.

Réalisant qu’elle s’apitoyait sur son sort alors que des dizaines de gens étaient morts ou en train de mourir sous ses yeux, Sarah se maudit de tant d’égoïsme.


Extrait P 123

Elle passa la nuit dans la même chambre d’hôtel que la veille, aux abords d’Oslo. A l’abri des regards, elle pleura. Beaucoup. Sans retenue.

Au petit matin, la peine était encore là, la peur de l’avenir aussi, mais une résolution s’était forgée en elle au cours des heures les plus sombres de la nuit. Si menaçante que soit cette enquête, elle allait s’y jeter avec l’énergie du désespoir. C’était sa seule chance de ne pas perdre pied. Elle espérait seulement que son corps et son esprit lui prêteraient l’énergie dont elle allait avoir besoin.

Extrait P 260

Christopher suffoquait, le cœur sur le point de s’arrêter. Confrontée à l’absurde, sa conscience décrocha du présent et flotta dans un espace vide et sans douleur. Cette douce antichambre de la folie qui vous épargne la souffrance en vous faisant sournoisement perdre la raison. Il y serait peut-être resté éternellement si ses années de reporter de guerre ne l’avaient pas partiellement accoutumé à la violence. Et puis il y avait Simon. Et il avait le désir d’essayer de le protéger.

Christopher tourna la tête vers son père. Le menton relevé, les yeux frémissants, le vieil homme était impassible, affichant l’attitude terrifiante de celui qui accepte sa souffrance pour accomplir son devoir.

- Je vois que tu n’as pas changé, Nathaniel, soupira Lazar. La quête du savoir et le devoir avant… l’humanité. Bien… je regrette de devoir en arriver là, Nathaniel, mais peut-être tiens-tu plus à tes enfants qu’à ta femme ?

Sergueï darda son lourd regard broussailleux en direction de Christopher et s’approcha de lui, son arme encore tachée du sang de sa mère.

Christopher le suivit des yeux, le cœur battant si vite que son corps entier tremblait.




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