Le petit chat est mort - Xavier De Moulins
- deslivresetmoi72
- 9 avr. 2021
- 3 min de lecture

C’est un roman très court qui touchera et résonnera chez tous les amoureux des chats. L’écriture est vraiment travaillée, souvent poétique pour évoquer tout ce qu’apporte la présence d’un chat au sein d’une famille.
En l’occurrence, la vie de ce petit chat fut brève mais le vide qu’il laisse après sa mort est infini.
En regardant ce petit chat prendre sa place chez lui, l’auteur qui a cédé au désir de sa fille en acceptant de l’adopter, apprend à envisager l’existence à travers les yeux et principes de vie du jeune félin.
Extrait 1
Nimbé dans ma pudeur, je n’ai jamais parlé avec elle ( = mère du narrateur) de ce qui nous lie depuis toujours, « ses antennes » et notre connexion. Dans notre façon d’être ensemble, tout est dit. Même si elle m’agace parfois, même si je ne supporte pas de la voir s’abîmer, même si j’ai peur de la perdre et que je résiste à sa vieillesse en la niant, que j’évite sa fatalité, nous sommes toujours connectés. Elle et moi.
Extrait 2
Je refuse de comprendre le jargon de ta véto qui sent si bon ; je me noie dans la piscine de ses paroles, je me débats contre la vérité, je ne cherche pas à savoir, je refuse d’accepter et je pense à ta famille, aux enfants, à l’affolement après l’annonce, aux soins qu’il va falloir leur prodiguer.
Extrait 3
Je ne pige pas. Je tourne le dos à cette histoire. Pourtant, ce matin, tu allais bien. Je t’ai quitté sans trop te prêter attention, j’avais des choses plus urgentes à régler que de m’inquiéter pour mon petit chat pépère.
Extrait 4
À peine en as-tu franchi le seuil que la maison t’a fait roi. Avec ta tête de prince, tes faux airs de lionceau, ta démarche de gangster, tu avançais, enfant gâté déjà sous nos mains baladeuses et les compliments extatiques des visiteurs.
Extrait 5
Sur le fil, toi, le chat funambule, tu nous as collé une sacrée frousse et un curieux vertige. T’en souviens-tu seulement, du paradis ? Je t’ai imaginé plongeant la tête la première dans la cour de la concierge, atterrissant les quatre fers en l’air, quatre étages plus bas, entre les bacs de fleurs et les poubelles de tri, et heureusement ma main… J’ai eu peur de te perdre ce soir-là. Pour la première fois, quelques semaines après ton arrivée chez nous, j’ai osé te serrer dans mes bras.
Extrait 6
En plus de mettre du zen dans nos rouages, tu embellissais les énergies des autres. C’était flagrant. À ton contact, chacun de nous redescendait de ses tensions, de ses pressions, de ses complications. Quand je rentrais trop nerveux, tu prenais sur ton dos mes furies et filais les cacher.
Extrait 7
En arrivant au bureau, j’ai miaulé que tu étais mort. Personne n’a relevé cette info, tout le monde était très occupé à surveiller l’huile sur le feu, l’état du monde sur son écran.
L’état du monde, c’est du sérieux, alors un chat, faut pas pousser.
J’ai miaulé que tu étais mort, et je n’en ai surtout pas rajouté, voyant s’égrainer sur mon ordinateur le nombre de tués dans la nuit. J’aurais aimé pourtant, je te jure, qu’une tête se redresse en ma direction, qu’un œil m’offre ses condoléances en silence, qu’une main caresse mon épaule en passant, ça m’aurait au fond un peu rassuré sur la nature humaine, et n’aurait rien changé pour toi. J’ai eu du mal à tenir, ce lendemain de ta disparition. J’ai eu envie de partir et de foutre le camp, loin. Après mon annonce en catimini, personne n’est venu jusqu’à moi. Personne, sauf le silence.
Extrait 8
Elle a beaucoup de qualités mais pas de chat à la maison, elle n’a jamais fait de place à cette expérience-là, à cette joie merveilleuse d’avoir contre ses jambes un chasseur de spleen, un attrape-cœur délicieux, un masseur de l’âme, une bête à chagrin. Elle ignore que les chats sauvent le monde.
Extrait 9
Il est curieux de préférer fermer les portes plutôt que de les ouvrir en grand, tout contrôler plutôt que de lâcher prise. La peur de tomber, sans doute, empêche les hommes d’être chats, la peur de ne pas être à la hauteur les retient de s’étirer sur les paliers de leur existence, de bien tailler la zone, d’être libres et légers. Ils préfèrent acheter des verrous et tout fermer à double tour. Elle était là, ta leçon. Oui, tu étais dans ma vie, la vie en mieux.
Extrait 10
La compagnie d’un chat est mieux qu’un livre de développement personnel écrit par un cynique abruti.
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