Oliver Twist - Charles Dickens
- deslivresetmoi72

- 9 nov.
- 6 min de lecture

Je viens de terminer Oliver Twist, grand classique de la littérature anglaise que je ne connaissais pas. A vrai dire, je n’avais, je crois, rien lu de Dickens hormis quelques extraits et, après en avoir entendu de nombreux éloges dans des émissions littéraires récentes, je me suis lancée dans cette lecture pour me faire ma propre idée.
Au départ, j’ai été assez séduite par le ton de l’auteur, assez sarcastique, ou même cynique et par le rythme du récit. Je ne suis pas assez spécialiste de l’histoire de l’Angleterre pour savoir si ce qui est décrit est plausible et colle à la réalité sociale ou si Dickens a grossi le trait…En tant que lectrice, côtoyer les bas-fonds de Londres et ses malfrats, violents, sans pitié et sans humanité a rendu plus pénible la poursuite du livre. Au final, heureusement, on retrouve une certaine justice faisant triompher le bien sur le mal ce qui permet au lecteur de percevoir un peu de lumière dans la noirceur générale qui englobe la majeure partie du roman.
Je pense aussi que j’ai lu cette histoire trop tard, qu’elle m’aurait peut-être plus parlé entre enfance et adolescence…Je n’en avais pas eu l’occasion alors. Je reste contente d’avoir découvert cette œuvre emblématique, mais ne suis pas sûre d’enchaîner toute la production littéraire de Dickens ensuite.
Dans ce récit, Olivier est un jeune orphelin recueilli par une association paroissiale qui n’a rien de charitable. Il enchaîne les rencontres et modes de vie entre misère dans un climat de violence banalisée et vraies bonnes âmes qui le prennent sous leur aile. Il est le lien entre tous les personnages croisés dans le roman.
Extrait n°1
Quel exemple frappant de l’influence du vêtement offrit alors le petit Olivier Twist ! Enveloppé dans la couverture qui jusqu’alors était son seul vêtement, il pouvait être fils d’un grand seigneur ou d’un mendiant : Il eût été difficile pour l’étranger le plus présomptueux de lui assigner un rang dans la société ; mais quand il fut enveloppé dans la vieille robe de calicot, jaunie à cet usage, il fut marqué et étiqueté, et se trouva, tout d’un coup à sa place : l’enfant de la paroisse, l’orphelin de l’hospice, le souffre-douleur affamé, destiné aux coups et aux mauvais traitements, au mépris de tout le monde, à la pitié de personne.
Extrait n°2
Un morceau de pain à la main, et coiffé de la petite casquette de drap brun des enfants de la paroisse, Olivier fut emmené par M. Bumble hors de cet affreux séjour, où jamais une parole ni un regard d’affection n’avait embelli ses tristes années d’enfance. Et pourtant il éclata en sanglots quand la porte se referma derrière lui ; quelque misérables que fussent les petits compagnons d’infortune qu’il quittait, c’étaient les seuls amis qu’il eût jamais connus, et le sentiment de son isolement dans ce vaste univers se fit jour pour la première fois dans le cœur de l’enfant.
Extrait n°3
c’était combiner ensemble d’une manière très simple les deux bienfaits qu’on lui accordait ; il reconnut l’un et l’autre par un profond salut à l’instigation du bedeau, puis on l’emmena dans une grande salle de l’hospice, où, sur un lit bien dur, il s’endormit en sanglotant : preuve éclatante de la douceur des lois de notre heureux pays, qui n’empêchent pas les pauvres de dormir !Pauvre Olivier ! Endormi dans l’heureuse ignorance de ce qui se passait autour de lui, il ne songeait guère que ce jour-là même le conseil venait de prendre une décision qui devait exercer sur sa destinée ultérieure une influence irrésistible : mais la décision était prise ; et voici quelle elle était.Les membres du conseil d’administration étaient des hommes pleins de sagesse et d’une philosophie profonde : en fixant leur attention sur le dépôt de mendicité, ils avaient découvert tout à coup ce que des esprits vulgaires n’eussent jamais aperçu, que les pauvres s’y plaisaient ! C’était pour les classes pauvres un séjour plein d’agrément, une taverne où l’on n’avait rien à payer, où l’on avait toute l’année le déjeuner, le dîner, le thé et le souper ; c’était un véritable Élysée de briques et de mortier, où l’on n’avait qu’à jouir sans travailler.« Oh ! oh ! se dit le conseil d’un air malin ; nous sommes gens à remettre les choses en ordre ; nous allons faire cesser cela tout de suite. »
Extrait n°4
De ma vie vivante, je n’ai jamais été plus certain d’une chose, disait le monsieur au gilet blanc en frappant à la porte le lendemain matin et en lisant l’affiche ; de ma vie vivante, je n’ai jamais été plus certain d’une chose ! c’est que cet enfant-là se fera pendre. »Comme je me propose, dans la suite de ce récit, de montrer si le monsieur au gilet blanc eut raison ou non, je nuirais peut-être à l’intérêt de ma narration (si toutefois elle en a), en faisant pressentir si la vie d’Olivier Twist eut ou non ce terrible dénoûment.
Extrait n°5
De petites ruelles et des passages couverts, qui çà et là aboutissaient à la rue principale, laissaient voir quelques chétives maisons, devant lesquelles des hommes et des femmes ivres se vautraient dans la boue ; et parfois on voyait sortir avec précaution de ces repaires des individus à figure sinistre, dont, selon toute apparence, les intentions n’étaient ni louables ni rassurantes.
Extrait n°6
l’expression de ses traits était dure, et son teint très coloré. Si en réalité il ne sortait jamais des bornes de la sobriété, il eût pu intenter à sa figure un procès en diffamation et obtenir des dommages-intérêts considérables.
Extrait n°7
Au contraire, en tirant bon parti de cet enfant, je puis faire avec lui, mes amis, plus qu’avec vingt autres. D’ailleurs, s’il parvenait encore à nous fausser compagnie, il nous tient : il est donc indispensable qu’il soit des nôtres. Qu’il participe à un seul vol, il n’en faut pas davantage pour que je le tienne à ma merci, et c’est tout ce que je veux. Cela vaut bien mieux que d’être obligé de se défaire de ce pauvre petit garnement ; d’abord nous y perdrions, et puis nous pourrions courir quelque danger.
Extrait n°8
Dans l’assistance, les figures portaient l’empreinte des vices les plus abjects, et attiraient l’attention à force d’être repoussantes. La ruse, la férocité, l’ivresse à tous les degrés, s’y montraient sous l’aspect le plus hideux. Des femmes, des jeunes filles à la fleur de l’âge, mais flétries par le vice, souillées de débauches et de crimes, formaient la partie la plus triste et la plus sombre de cet affreux tableau.
Extrait n°9
L’entretien fut long : Olivier raconta toute son histoire ; son état de souffrance et de faiblesse le força souvent d’interrompre son récit. Il y avait quelque chose de solennel à entendre, dans cette chambre sombre, la faible voix de cet enfant blessé, racontant la longue suite de malheurs et de souffrances que des hommes cruels lui avaient fait endurer. Oh ! si nous songions, quand nous accablons nos semblables, aux fatales erreurs de la justice humaine, aux iniquités qui crient vengeance au ciel, et attirent tôt ou tard le châtiment sur nos têtes ; si nous pouvions entendre la voix de tant de victimes, s’élevant du fond des tombeaux ; voix plaintive que nulle puissance ne peut forcer au silence, le monde offrirait-il chaque jour tant d’exemples d’injustice et de violence, tant de misère et de cruautés ?
Extrait n°10
L’espoir d’arriver un jour à s’expliquer avec eux, et à leur conter comment il avait été enlevé, l’avait fortifié et soutenu dans ses récentes épreuves ; et maintenant la pensée qu’ils étaient partis si loin, et qu’ils avaient emporté de lui l’opinion qu’il n’était qu’un imposteur et un filou, sans qu’il dût avoir peut-être jamais l’occasion de les détromper, cette pensée était pour lui poignante et insupportable.
Extrait n°11
Derrière le rideau blanc qui l’avait dérobée à la vue d’Henry quand il avait levé les yeux vers la fenêtre, Rose était assise immobile.« Il semble heureux, dit-elle enfin ; j’ai craint quelque temps qu’il n’en fût autrement. Je m’étais trompée. Je suis contente, très contente. »La joie fait couler les larmes aussi bien que la douleur, mais celles qui baignaient la figure de Rose, tandis qu’elle était assise pensive à sa fenêtre, les yeux toujours fixés dans la même direction, semblaient des larmes de douleur plutôt que de joie.
Extrait n°12
Quand de jeunes demoiselles aussi belles, aussi bonnes que vous, donnent leur cœur, reprit avec fermeté Nancy, l’amour peut les entraîner loin. Oui, il peut vous entraîner vous-même, qui avez une demeure, des amis, des admirateurs, tout ce qui peut séduire. Quand des femmes comme moi, qui n’ont d’autre asile assuré qu’un cercueil, d’autre ami dans la maladie ou la mort que les servantes d’un hospice ; quand ces femmes-là ont livré leur cœur impur à un homme ; que cet homme leur tient lieu de parents, de demeure, d’amis ; que cet amour a jeté une lueur sur leur misérable existence, qui peut espérer les guérir ? Plaignez-nous, mademoiselle… plaignez-nous d’être encore femmes par ce sentiment ; plaignez-nous, car un arrêt terrible a changé en tourments et en souffrances ce qui devait faire notre consolation et notre orgueil.




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